Parler du harcèlement scolaire pour éviter d’être harcelé, de devenir harceleur ou témoin
Parler du harcèlement avec les enfants est un bon moyen d’engager la conversation, d’identifier les problèmes éventuels, mais aussi de montrer ce qu’il se passe quand on est harcelé.
L’histoire de la Bande Dessinée Seule à la Récré
La BD, Seule à la récré de Ana et Bloz, aux éditions bamboo, est une bande dessinée qui met en scène l’histoire d’une petite fille dans son école au retour des vacances. Alors que chacun s’enthousiasme à l’idée de revoir ses amis, Emma s’attriste de devoir rentrer. En fait, elle a été prise en grippe par une élève, qu’on qualifierait de “populaire”… Autrement dit, une fille capable d’emmener derrière elle un groupe d’enfants pour le pire, par la manipulation et la peur.
Sans dévoiler toute l’histoire, Emma se retrouve peu à peu entièrement seule,subit des brimades de toutes sortes, y compris physiques. De plus, elle n’arrive pas à se faire entendre des enseignants ou de la directrice car La harceleuse est une bonne élève, sans histoire, qu’il est difficile de voir en tortionnaire lorsqu’on est adulte.
L’histoire est vraiment prenante: les parents finissent par réaliser qu’il se passe quelque chose d’anormal, et essaient d’en alerter les autres parents. Mais tous restent sourds ou faussement compatissants par peur des représailles sur leurs propres enfants.
L’approche
Un côté intéressant de la BD, est de montrer les émotions de chacune des petits filles, la harceleuse et la harcelée. On suit la vie des deux fillettes en parallèle. On comprend pourquoi Clarisse est devenue une harceleuse…
On suit la petite fille et ses parents dans leur chemin jonché d’obstacles pour se faire entendre. Je ne vous dis pas la suite de l’histoire pour vous laisser le plaisir de la découvrir.
Autour de la Bande dessinée
Au début du livre, une préface de Melissa Theuriau
A la fin du livre, des fiches pratiques, le rappel du numéro d’urgence et des conseils pour les enfants qu’ils soient harcelés ou témoins, mais aussi pour les parents.
Infos
Le livre de 48 pages est disponible chez votre libraire préféré, ou sur ♥ Amazon pour 10,60€.
Le sujet du harcèlement scolaire
Le harcèlement scolaire est courant, on a souvent tendance à l’associer notre époque. On entend souvent que les enfants actuels sont plus durs que ceux d’autrefois. Je ne pense pas, il suffit de lire La guerre des boutons ou les romans de Pagnol…
Par contre, le harcèlement est plus présent dans la vie des enfants et ados: les téléphones portables, les emails poursuivent les enfants jusque chez eux. Et également, contrairement aux époques des romans dont j’ai cité, les enfants sont plus désœuvrés et ont donc plus de temps à passer à harceler les autres s’ils s’ennuient… (voir aussi les défis dangereux sur le Net)
L’objet de cette BD est de parler et de fournir un sujet de discussion autour du harcèlement: briser le silence quand on est harcelé, est difficile, d’autant plus quand on n’est pas entendu. La BD est également intéressante car elle ne se place pas uniquement du côté de la fillette harcelée, elle montre également la vie de la fillette harceleuse, de ses parents, et surtout, des témoins actifs et passifs, enfants et adultes compris.
En effet, dans toute notre attitude de bienveillance envers nos enfants, on oublie souvent d’être bienveillant également envers les autres. On se soucie beaucoup du bien-être de son enfant, mais qui se pose un jour la question de savoir si son enfant est un harceleur…? Comme je le mentionnais dans mon article précédent sur la bienveillance envers les enfants des autres, il est sans doute plus facile d’imaginer que les enfants harceleurs sont “repérables”
Harceleur, témoins
Mais, en fait non, les harceleurs sont dans la plupart des cas des enfants mignons et appréciés des adultes.
J’ai connu une jeune fille qui a glissé vers le harcèlement une fois arrivée au collège. En primaire, elle n’était pas harcelée mais un peu gauche. A l’adolescence, elle s’est épanouie et est devenue “populaire”. Elle s’est mise à harceler son ancienne meilleure amie, sans doute parce qu’elle avait été le témoin de ses faiblesses passées. Cette jeune fille – excellente élève, bien sous tous rapports, fille de prof – avait réussi à monter un petit groupe, qu’elle persuadait sans difficulté de pousser son ancienne amie dans les escaliers, de lui lancer son cartable, de lui cacher son manteau en hiver… Avec les termes habituels : “Oh si on ne peut même plus rigoler…” Cela a duré quelques temps puis la jeune fille a trouvé le courage d’en parler à ses parents. Un mail précis et ferme aux parents de la jeune fille harceleuse a suffi à arrêter la tendance et elle s’est sans doute trouver un autre sujet d’occupation.
La BD permet de mettre en exergue ces comportements, de rappeler à l’enfant que ce n’est pas bien. je dis souvent à mes enfants de ne pas faire ou dire aux autres ce qu’elles ne voudraient pas qu’on leur fasse, dise. Quand on dit c’est pour rire et que l’autre ne rit pas qu’il pleure, c’est que non, ce n’était pas pour rire. Une blague doit être partagée, pas subie, même si les émissions de télévision actuelles ont tendance à cautionner le contraire.
D’ailleurs, je pense que cette BD n’est pas à réserver aux enfants, tous les parents et enseignants devraient s’y plonger.
Notre avis sur la BD Seule à la récré
L’avis de Mlle P.
Mlle P. la lit et la relit régulièrement. J’en ai profité pour aborder le sujet avec elle, lui demandé si elle avait connaissance de cas similaires. Nous avons discuté de ce qui se faisait et de ce qui ne se faisait pas, même pour rire. Elle aime vraiment beaucoup cette BD.
Mon avis de maman
Je trouve vraiment bien qu’on “voie” au travers des deux personnages tour à tour. Cela permet de mieux comprendre les situations et l’évolution. Il y a de l’humour, des émotions.
Par contre, avec mes yeux d’adultes, je trouve cette BD assez pessimiste; il n’y a pas de happy ending. Ou plutôt si, la fin heureuse est quand Emma ose enfin parler à ses parents. Pour le reste, c’est quand même assez sombre et pas vraiment optimiste sur la nature humaine.
C’est sans doute vrai, mais personnellement, j’aurais préféré une histoire qui se termine mieux, du style Clarisse se rend compte de son erreur et change. Là, on a l’impression que le harceleur, les témoins, personne n’est capable de changer. C’est assez triste. Mais peut-être est-ce parce que je lis cette BD avec mon esprit d’adulte car ça n’a pas l’air de gêner Mlle P.